
UEF BELGIUM IN THE PRESS | Il est urgent de fédérer l'Europe pour assurer notre sécurité
Please find here the link to the article “Il est urgent de fédérer l'Europe pour assurer notre sécurité” published on the La Libre Belgium. This article was written in French by Jean Marsia, Philippe van Damme and Domenico Rossetti di Valdalbero members of UEF Belgium.
FRENCH | Les récentes cyberattaques, l'invasion de l'Ukraine par la Russie et l'arrivée au pouvoir de Donald Trump incitent l'Union européenne et ses États membres à considérablement augmenter leurs budgets et leurs moyens de défense et de sécurité civile.
Mais la passation de marchés, le développement de capacités opérationnelles et la coordination des organismes nationaux en charge de la cybersécurité doivent s'européaniser. L'industrie européenne de la défense est sous-dimensionnée et organisée en fonction des États. L'UE dispose d'outils limités pour la production industrielle de matériel de défense, pour développer des systèmes de surveillance réseau, pour protéger les infrastructures critiques et pour encourager la recherche et l'innovation en commun et pour promouvoir la passation conjointe de marchés.
Le plan Rearm Europe présenté par la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, vise à adapter les critères de convergence budgétaire européens afin de permettre aux États membres d'emprunter quelque 650 milliards d'euros. Le plan propose en outre que l'UE emprunte 150 milliards d'euros qui pourraient être mis à la disposition des États. Ce plan n'envisage pas de procéder via une autorité européenne pour les achats d'armements comme cela avait été le cas pour les vaccins durant la crise du Covid. Ce sont les États membres qui garderaient la maîtrise de la passation des marchés publics. Le Commissaire européen Andrius Kubilius avait pointé le besoin d'accélérer et de dépasser l'incrémental, de générer des économies d'échelle et de donner à l'industrie les moyens d'accroître sa production.
Macron est-il crédible ?
Les États membres ont le monopole de l'usage légitime de la force. D'un point de vue militaire, de sécurité et de sûreté, pour être efficace, crédible et dissuasive, l'Europe doit disposer d'une chaîne de commandement européenne, unique, légitime et donc émanant d'un pouvoir politique démocratiquement élu au niveau européen. Les rapports Letta, Draghi et Niinistö se rejoignaient dans ce sens.
La dissuasion ne consiste pas seulement à déployer des capacités militaires, même des moyens de destruction massive. C'est surtout persuader l'adversaire qu'on est prêt à les utiliser. Avec Trump au pouvoir, il est devenu déraisonnable de s'appuyer sur l'Otan, c'est-à-dire essentiellement sur les États-Unis d'Amérique pour les capacités militaires et pour les services de renseignement qui dépendent des satellites et des serveurs américains.
Est-ce que le Président Macron est crédible en offrant son parapluie nucléaire pour protéger l'Europe ? La France parvient-elle à convaincre Poutine qu'elle est prête à risquer la destruction de Paris, Lyon ou Bordeaux pour protéger Tallinn, Riga ou Vilnius ? Qui doit intervenir lorsque plusieurs États membres sont la cible d'une cyberattaque.
L'Europe menacée 130 fois par Poutine
L'Otan sans les Américains, c'est peu de capacités et beaucoup de lacunes. Depuis 75 ans, l'Otan n'a pas rendu plus efficientes les dépenses de défense européennes. Depuis 1992 et le traité de Maastricht instaurant la PESC/PESD, l'UE n'a pas réussi à rendre crédible la défense européenne et la sécurité du continent. Les 400 milliards d'euros par an dépensés par les Européens pour leur défense servent principalement à payer un million et demi de soldats dont moins de 50.000 sont réellement opérationnels. La nouvelle doctrine de l'Otan prévoit qu'en cas d'attaque, les pays européens doivent mobiliser 300.000 soldats dans un délai d'un mois et 500.000 dans un délai de six mois, sans préciser comment faire. En dépensant la moitié du budget de la défense américaine, les Européens n'ont qu'un dixième de leurs capacités militaires.
Il est urgent d'agir. En 3 ans de guerre, Poutine a menacé 130 fois l'Europe d'attaque nucléaire. Depuis le début de 2024, 11 câbles ont été endommagés en Baltique, notamment par des navires laissant traîner leur ancre sur le fond marin. Poutine a très probablement maintes fois attaqué des infrastructures critiques dans l'UE. Les cyberattaques sont devenues monnaie courante dans les pays de l'Union qu'il s'agisse de centrales et de réseaux électriques, de télécommunications, d'hôpitaux ou de services financiers en paralysant – au propre et au figuré – plusieurs États membres à la fois.
Alors que le Président russe n'a plus aucun respect du droit international, qui prescrit l'intégrité et l'inviolabilité des frontières, le populisme séduit une part importante des Américains. Heureusement, les coalitions de volontaires peuvent s'avérer efficaces. Les Américains ayant délaissé la présidence du Groupe de contact de défense de l'Ukraine, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont réuni 51 nations le 11 avril 2025 au siège de l'Otan. Cela est louable mais la Commission et le Service Européen d'Action Extérieure devraient être plus présents.
Soutenir l'Ukraine
De nouveaux programmes d'aide militaire à Kiev, d'une valeur de plus de 21 milliards d'euros ont été approuvés (sans le soutien de Washington). L'Allemagne donne plus de la moitié du total, soit des systèmes de défense aérienne IRIS-T et les missiles associés, des missiles antiaériens Patriot, des véhicules de combat d'infanterie Marder, des chars de combat Léopard, des obusiers et des munitions, ainsi que de la formation. Le Royaume-Uni et la Norvège vont livrer des drones FPV (First Person View) à vision subjective, des drones armés, des systèmes radar, des armes et des mines antichars pour un demi-milliard d'euros. Les drones FPV et armés sont responsables de 60 à 70 % des dommages causés aux équipements russes. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a déclaré après la réunion que "la Russie doit comprendre que l'Ukraine est capable de continuer à se battre et que nous la soutiendrons".
Pour dissuader et réduire le gaspillage actuel de ressources financières et humaines, l'Europe a besoin de la fédération annoncée le 9 mai 1950 par Robert Schuman. Comme pour l'espace Schengen ou l'euro, une petite coalition d'États volontaires, une avant-garde, devrait se rassembler puis s'étendre.
Pour une Europe fédérale
Une Europe fédérale permettrait de sortir notre base industrielle et technologique de défense de sa situation précaire. Malgré la création de l'Agence européenne de défense en 2004 et l'augmentation récente des dépenses de défense, le marché européen de l'armement n'est pas assez important pour permettre à l'industrie européenne de répondre aux besoins en équipements. Une grande partie de ceux-ci est donc acquise aux États-Unis, en Corée du Sud ou en Turquie, ce qui réduit le PIB et l'emploi de l'UE.
Une victoire de Poutine en Ukraine, c'est non seulement abandonner nos valeurs mais aussi augmenter les risques d'agression de la Russie dans toute l'Union. Prise en étau entre la Russie de Poutine et les États-Unis de Trump, l'UE doit résolument prendre la voie d'une défense, d'une sécurité et d'une sûreté européenne construite sur une union politique fédérale. Il n'est pas trop tard mais il est temps.
ENGLISH | Recent cyber attacks, Russia's invasion of Ukraine and Donald Trump's rise to power have prompted the European Union and its Member States to significantly increase their defence and civil security budgets and resources. But procurement, the development of operational capabilities and the coordination of national bodies in charge of cyber security need to be Europeanised. The European defence industry is undersized and organised along national lines.
The EU has limited tools for the industrial production of defence equipment, for developing network surveillance systems, for protecting critical infrastructures and for encouraging joint research and innovation and promoting joint procurement.
The Rearm Europe plan presented by the President of the Commission, Ursula von der Leyen, aims to adapt the European budgetary convergence criteria to allow Member States to borrow some 650 billion euros. The plan also proposes that the EU should borrow €150 billion, which could be made available to Member States. The plan does not envisage a European authority for arms purchases, as was the case for vaccines during the Covid crisis. The Member States would retain control over the award of public contracts. European Commissioner Andrius Kubilius had pointed to the need to accelerate and move beyond incrementalism, generate economies of scale and give industry the means to increase production.
Is Macron credible?
Member States have a monopoly on the legitimate use of force. From a military, security and safety point of view, in order to be effective, credible and a deterrent, Europe must have a single, legitimate European chain of command that emanates from a democratically elected political power at European level. The Letta, Draghi and Niinistö reports were all along these lines. Deterrence is not just about deploying military capabilities, even means of mass destruction. Above all, it means persuading your adversary that you are prepared to use them. With Trump in power, it has become unreasonable to rely on Nato, i.e. essentially on the United States of America for military capabilities and for intelligence services that depend on American satellites and servers.
Is President Macron credible in offering his nuclear umbrella to protect Europe? Can France convince Putin that it is prepared to risk the destruction of Paris, Lyon or Bordeaux to protect Tallinn, Riga or Vilnius? Who should intervene when several Member States are the target of a cyber attack?
Europe threatened 130 times by Putin
NATO without the Americans has few capabilities and many shortcomings. For 75 years, NATO has not made European defence spending more efficient. Since 1992 and the Maastricht Treaty establishing the CFSP/ESDP, the EU has failed to make European defence and the security of the continent credible. The 400 billion euros a year spent by Europeans on their defence is mainly used to pay for one and a half million soldiers, of whom fewer than 50,000 are actually operational. NATO's new doctrine stipulates that in the event of an attack, European countries must mobilise 300,000 soldiers within one month and 500,000 within six months, without specifying how. Spending half of the US defence budget, Europeans have only one tenth of their military capabilities.
There is an urgent need for action. In 3 years of war, Putin has threatened Europe with nuclear attack 130 times. Since the beginning of 2024, 11 cables have been damaged in the Baltic, in particular by ships dragging their anchors on the seabed. It is highly likely that Putin has repeatedly attacked critical infrastructure in the EU.
Cyber-attacks have become commonplace in EU countries, affecting power stations and networks, telecommunications, hospitals and financial services, literally and figuratively paralysing several Member States at once. While the Russian President no longer has any respect for international law, which prescribes the integrity and inviolability of borders, populism is appealing to a significant proportion of Americans. Fortunately, coalitions of the willing can be effective. With the Americans relinquishing the chairmanship of the Ukraine Defence Contact Group, the UK and Germany brought 51 nations together on 11 April 2025 at Nato headquarters. This is commendable, but the Commission and the European External Action Service should be more present.
Supporting Ukraine
New military aid programmes for Kiev worth over €21 billion have been approved (without Washington's support). Germany is donating more than half of the total, including IRIS-T air defence systems and associated missiles, Patriot anti-aircraft missiles, Marder infantry fighting vehicles, Leopard battle tanks, howitzers and ammunition, as well as training. The UK and Norway are to supply FPV (First Person View) drones, armed drones, radar systems, weapons and anti-tank mines for half a billion euros. FPV and armed drones are responsible for 60-70% of the damage caused to Russian equipment. German Defence Minister Boris Pistorius said after the meeting that "Russia must understand that Ukraine is capable of continuing to fight and that we will support it". To deter and reduce the current waste of financial and human resources, Europe needs the federation announced on 9 May 1950 by Robert Schuman. As with the Schengen area and the euro, a small coalition of willing states, a vanguard, should come together and then expand.
For a federal Europe
A federal Europe would enable our defence industrial and technological base to emerge from its precarious situation. Despite the creation of the European Defence Agency in 2004 and the recent increase in defence spending, the European armaments market is not large enough to enable European industry to meet equipment needs.
Much of this equipment is therefore purchased from the United States, South Korea or Turkey, which reduces the EU's GDP and employment. A Putin victory in Ukraine would mean not only abandoning our values but also increasing the risk of Russian aggression throughout the Union. Caught between Putin's Russia and Trump's United States, the EU must resolutely take the path of European defence, security and safety built on a federal political union. It is not too late, but it is time.